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DEPASSER, SE DEPASSER
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CHATEAU D'OUDON - SCENO
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2006
2005
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2003
PERRIERES > APD
PIERROT>
PERRIERES > APS
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COMEDIE ENFANTINE
TRAIN FANTOME
2001
CALDERON
LULU
SO WHAT
CHAUMONT 2
SOURCE
2000
CHAUMONT 1
1999
C42
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ADRESSES CONNEXES
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LA VIE EST UN SONGE
Un théâtre pour la vie est un songe de Calderon de la Barca
(A partir de la comedia de Calderon de la Barca et du postulat
que chaque texte dramatique sécrète, induit, nécessite un ou plusieurs
espaces/temps inséparables de la fiction originale, concevoir un
théâtre unique pour la représentation de cette œuvre; maquette volume
au 1/20° avec prise en compte des éclairages, des costumes, du
mobilier, des accessoires)
—
Direction de la recherche
Ecouter
un texte dramatique. Recréer fidèlement la dimension sonore de
l’univers imaginé par Calderòn, et partir de cette sensation pour
engendrer un nouvel univers, celui de la représentation théâtrale de
son texte.
Parti scénographique
Comme la grotte à Bethléem qui a vu naître le Christ, et qui est aujourd’hui enchâssée dans une chapelle,
telle
une relique... Ici, un théâtre s’est installé autour d’un gros rocher à
cause des fantômes qui en sortent parfois, pour conter l’histoire du
Prince Sigismond. Des coursives ont donc été érigées, qui encerclent le
rocher (comme un belvédère donne un point de vue privilégié sur un site
archéologique).
C’est une dent creuse, quelque part dans la ville.
La démolition a mis au jour la geôle de Sigismond, creusée dans la roche.
On a monté des échaffaudages pour permettre aux gens d’assister au phénomène, tant qu’il se manifeste.
Le temps d’une représentation, les murs écorchés de ce théâtre
improvisé deviennent le palais, le vestiaire la garde-robe de la cour...
Premières lectures
Lecture
à voix haute, pour entendre la métrique (rythme, rimes, pauses,
souffles...) du texte traduit par Bernard Sesé. Les effets acoustiques
écrits pour les personnages peuvent ainsi apparaître (allitérations,
changement de rythme, cassure de certaines phrases, assonances...)
Mais au-delà des effets sonores "intentionnels" (stylistiques) disposés
par Bernard Sesé, il importe surtout d'être très disponible vis-à-vis
du texte, et attentif aux visions qu'il engendre: Associations libres,
sans penser encore au projet scénographique (pas de contraintes
matérielles, économiques... On peut alors s'imaginer travailler à une
série d'illustrations ou à un film pour se libérer des entraves et
difficultés rencontrées sur une scène réelle). Ces "visions" que le
texte fait naître dans mon esprit doivent toutes être rendues
tangibles, enregistrées: par le dessin, ou par les descriptions
textuelles dans le cas des sons. Elles peuvent également être des
références, graphiques, musicales, sonores...
Relectures
Deux
types de recherche sont alors menées simultanément, l'une est
documentaire et l'autre est, comme décrite précédemment, intuitive.
A partir de sons «écoutés» dans le texte, des maquettes d’étude
viennent cristalliser des idées de volumes, de matières... Peu à peu le
théâtre s’esquisse, se dessine. Les scans de ces maquettes serviront à
l’esquisse du story board, la version définitive s’appuyant sur les
vues de la maquette finale.
Recherche documentaire
Décortiquer
le texte, à la manière d'une enquête, pour connaître toutes les
informations distillées par l'auteur au fil de l'action qu'il raconte.
Cette étape est très analytique, c'est une recherche d'indices, et une
mise en évidence des "trous", des vides laissés par l'écrivain à notre
imagination.
Elle intéresse les sons, les images en présence desquels l'action
elle-même nous place. Les sons décrits par l'action: les accessoires,
les matériaux, les armes, les actes, les musiques... Pour tâcher d'être
exhaustif, il faut éplucher le texte, dresser l'inventaire des éléments
qui sonnent, ou sont susceptibles de le faire.
Un
exemple: L'arrivée du Roi dans la salle du palais, où l'attendent
Astolphe et Etoile. Ce passage du texte de Calderòn est significatif
car il regroupe plusieurs sortes d'indications concernant le domaine
sonore:
-Quelques didascalies nous renseignent, elles donnent des
renseignements extrêmement précis, et avec concision. Mais ces
indications sont à prendre au conditionnel: Le corps de l'action est
presque tout entier contenu dans le texte prononcé par les acteurs,
prioritaire sur les indications scéniques qui ont pu être écrites ou
traduites avec approximation.
"Roulement de tambours
Entre le Roi Basyle, un vieillard, avec son cortège"
-L'instant d'avant, la parole est coupée à Astolphe "par tous ces
instruments sonores annonçant l'arrivée du Roi, suivi de son cortège."
Dans la longue tirade qui s'ensuit, dite par le Roi Basyle, d'autres
indices modèlent l'environnement sonore du palais. Certains sont
intimement liés à l'action:
"Je ne vous demande en cette occasion,
que le silence;" (Vers 597-598)
Le vieux souverain intime l'ordre à l'assistance de baisser d'un ton, afin qu'il puisse se faire entendre.
"Vous savez—prêtez-moi attention,
mes chers neveux,
illustre cour de Pologne,
vassaux, parents et amis—" (Vers 600 à 603)
Beaucoup de monde se presse dans la salle du palais où le discours est
proféré, et pour cette raison peut-être, Basyle dont la vigueur est
diminuée peine à se faire entendre. Une seconde fois le roi est
contraint de demander le silence, avant de révéler l'existence de son
fils.
Puis, du moment de ce coup de théâtre jusqu'à la fin de la tirade, le
Roi ne fait plus d'adresse à son public, probablement trop ébahi pour
continuer à se manifester...
D'autres indices sont d'ordre métaphorique: Les sons que le texte fait
entendre, même si l'action ne nous met pas directement en leur
présence. Ils sont nombreux dans La vie est un songe, car la langue de
Calderon est très imagée. On entend presque disctinctement le tintement
de
"Ces cercles de neige,
ces baldaquins de verre,
que le soleil illumine de ses rayons,
que la lune découpe en tournant,
ces orbes de diamants,
ces globes cristallins
qu'ornent les étoiles,
où trônent les signes des astres, (...)" (Vers 624 à 631)
Ils échappent au cours de l'histoire, semblent exister hors de l'instant présent, mais en sont pourtant inséparables.
Quand on y revient avec sans cesse davantage d'insistance, le texte
semble une matière en expansion, qui peut s'étirer sans jamais perdre
en densité. Ainsi, le discours du vieux Basyle nous permet d'écouter la
grande salle du palais (comme cette ambiance pourrait nous être
restituée par un microphone).
Cette étude est dite documentaire car elle est pratiquée comme une
enquête, une collecte d'indices, avec un souci d'exactitude et
d'objectivité.
Comment
la mode de l'époque enveloppait-elle les corps, quelles étoffes
sifflaient en glissant l'une contre l'autre ? Quel était le poids des
armes qui équipaient les guerriers, le tintement de leur métal était-il
arboré fièrement ou dissimulé derrière un lourd manteau ? Quelle était
la dimension de la scène pour laquelle Calderon a pensé son texte,
conditionnant en grande partie l'intensité de la voix des acteurs et
leur diction ? Quelle était la place du théâtre dans la cité, au centre
d'un parvis tumultueux ou engoncé dans l'intimité d'un patio ?
Toutes
ces données ne sont pas recueillies pour singer le théâtre de l'époque
de Calderon, mais il est essentiel de bien les connaître, si l'on veut
ensuite s'en détacher en toute connaissance de cause.
On perçoit bien ici que les indices sont éparpillés partout dans le
texte, formant un tissu/motif complexe dans lequel il faut s'inventer
ses propres parcours, déambulations...
Recherche intuitive
Les sons et les images que le texte m'évoque, à moi précisément. Ici il
ne s'agit pas, a contrario de la recherche documentaire, de s'échapper
du texte (surtout pas, on ne doit jamais le quitter mais tourner autour
de lui de mille façons différentes), mais d'être à l'écoute de la
résonance que trouve le texte en moi, sans me censurer, en évitant de
mettre de côté a priori telle ou telle idée qui me paraitrait saugrenue
de prime abord.
Ces recherches aboutissent à une collection de documents, qui chacun à
sa manière parle d'un projet possible pour La vie est un songe de
Calderon: Parfois, grâce à un plan global sur l'ensemble de l'oeuvre
(la lecture d'un texte peut tout-à-fait imposer à l'esprit une
impression acoustique abstraite, à la fois très juste, précise et très
personnelle); ou bien par l'illustration d'un lieu, d'un personnage
traversé par l'action; ou encore sous forme d'un plan très rapproché,
microscopique, focalisant son attention sur une réplique, un geste, un
son...
Dans
ce petit recueil (qui continuera de s'étoffer au fur et à mesure du
travail), plusieurs échelles du projet se côtoient donc, et cohabitent
malgré leurs divergences et leurs contradictions.
Puis, affiner le panel des possibles contenu dans le catalogue (faire
le tri). En continuant de pratiquer la lecture du texte, entrelacer les
motifs collectés intuitivement avec d'autres, issus de l'analyse
dramaturgique pratiquée sur le texte.
Exemple d'aller et venue entre image/texte/son: La caverne de Sigsimond
Collecte des termes décrivant la caverne:
Alentours:
-”Dans le labyrinthe confus de ces rocs dénudés”
La caverne:
-”Un édifice”
-”Au milieu de rochers dénudés se dresse
un palais rustique si modeste
qu’il ose à peine regarder le soleil.
L’architecture de l’édifice
est de si grossière façon
qu’au pied de tant de rocs
et de tant de rocailles
qui touchent le soleil,
on dirait un rocher dévalé du sommet.”
-”La porte
(ou plutôt la gueule funeste)
en est ouverte, et de son centre
naît la nuit, car c’est là
qu’elle est engendrée”
-”Obscur habitacle, d’une clarté douteuse”
-”une prison obscure”
-”la sépulture”
-”sous ces voûtes froides”
-”lieu interdit”
-”fermez
la porte de cette étroite prison”
-”Qu’ils ne voient ni
comment ni par où ils sortent.”
Sons évoqués par le texte, tantôt envisageant la description de la
grotte dans une globalité (Harmonic Choir, decrescendo très lent, sans
début ni fin / Soft Machine, un tintement sur une vibration grave /
David Holmes, les sons froids et lisses d’un parking souterrain),
tantôt portant sur des matériaux sonores recherchés plus précisément
(Pour l’entrée dans la prison, des sons évoquant des variations de
densité très fortes, une suite de concentrations et de dilatations...)
L'écoute réduite de ces sons (détachés de leur contexte, des qualités
de leur source sonore) mène à une recherche en volume: Qu'est-ce que de
tels sons signifient comme mouvement, trajectoire, masse ? Il faut non
seulement chercher la représentation spatiale des sons envisagés
(structure, matériau, dimension...), mais surtout imaginer comment ils
pourraient être produits, et par quel type d'action.
Exemple: John Zorn, extrait de l'album Naked city:
Un morceau composé de deux parties: La première est d’une
extraordinaire densité, presque un bruit blanc, elle est jouée
extrêmement fort. La seconde fait chuter instantanément le niveau de
bruit installé, on entend alors l’écho lointain d’une guitare au son
cristallin égrenant quelques arpèges.
Il
faut réécouter le son, dix fois, cent fois ou davantage, et alors
l’oreille s’affine, se détache des représentations liées aux conditions
de production du son, pour ne se concentrer que sur l’image de son
elle-même. Il est alors possible de dénombrer, d’isoler et de décrire
les matériaux sonores en présence desquels on se trouve, avec une
précision quasi clinique, et d’essayer de comprendre la relation de ce
corps sonore avec celui de la grotte de Sigismond, décrite par Calderon.
Des
indices, jusqu’alors sous-jacents, apparaissent clairement. Le
mouvement de l’entrée dans la grotte prend les allures d’une déchirure;
le raclement, l’étroitesse traversent une matière compacte pour être
ensuite éjecté dans un volume presque immobile et ouaté...
Des
maquettes en volume, accompagnant cette recherche, associent les bruits
à des matériaux concrets. Le béton, le tissu présents dans le projet
final m’ont donc été en grande partie suggérés par la musique de John
Zorn; Ces deux matériaux sont utilisés non seulement pour l’imagerie
créée sur scène, mais aussi pour la production sonore qu’ils pourront y
engendrer in situ, dans le temps de la représentation, lorsque les
acteurs les pratiqueront.
On peut faire de même pour tous les sons collectés, et les écouter
comme si ils provenaient d'une action théâtrale, ou engendraient une
situation particulière: Après s'être accordé une grande liberté de
penser, d'imaginer, de dessiner vis-à-vis de l'oeuvre-programme
architectural, tous les matériaux collectés doivent être observés d'une
façon "neuve", presque naïve, mais se plaçant toujours en perspective
du texte original. Si l'on tient compte de cette mise en garde, on peut
les utiliser comme une matière première quasiment inépuisable.
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